Les groupes d’entraide mutuelle constituent une évolution indéniable dans l’approche du handicap. Leur forme associative qui tend parfois, dans la mesure du possible, à l’autogestion, et ce d’autant plus depuis la dernière mouture de leur cahier des charges, pousse à les définir comme une démocratie (chacun a droit à la parole), et une république (le GEM est l’affaire de tous). D’où l’idée de décliner la notion de Web 2.0 en handicap psychique 2.0 pour compléter et illustrer cette définition. Le Web 2.0 est apparu au début des années 2000 pour se développer jusqu’à nos jours par le biais, notamment, des réseaux sociaux. L’idée est que l’internaute devienne acteur des contenus diffusés sur la toile. Certains auteurs ont même parlé à cet égard de révolution comparable à la redécouverte de l’imprimerie par Gutenberg au XVe siècle. Sans aller jusque-là, il convient de souligner en parallèle en quoi les groupes d’entraide mutuelle ont bousculé, voire dérouté, le monde institutionnel sanitaire et social, quitte à influencer leurs approches du handicap.

Le secteur médico-social, souvent représenté par des associations, est porteur de différents discours, dont la variable d’ajustement tient souvent au degré de perception des capacités d’autonomisation des personnes en situation de handicap. Entre l’accessibilité universelle et le paternalisme, entre l’inclusion, l’intégration, et l’institutionnalisation, ce sont les courbes d’histoires associatives diverses qui se dessinent et dont les pratiques actuelles répondent à l’écho lointain de la gestation idéelle de l’association. Le type des acteurs-fondateurs explique souvent l’approche : association de familles ou d’enseignants, association religieuse ou laïque. Pour autant, la loi de 2005 et les textes qui ont suivi ont contraint tous les établissements médico-sociaux et l’institution sanitaire à créer des organes de représentation des usagers et patients. Dans la pratique, si les instances existent, leur paramétrage leur légitimité, et surtout leur poids dans la vie des instances semble variable et discutable.

De ce fait, les GEM, par leur réussite, ont ouvert une brèche idéologique face aux approches les plus récalcitrantes à l’émancipation des personnes en situation de handicap. Rappelons, nonobstant, que c’est en premier lieu l’inscription dans les textes de loi de notion de handicap psychique qui a rebattu les cartes et modifié la donne. La dimension dite invisible, l’état de conscience et les facultés cognitives et fonctionnelles de nombreuses personnes en souffrance psychique, imposaient aux professionnels de redéfinir les modalités d’accompagnement, basés souvent sur l’infantilisation et le contrôle (voir Michel Foucault, Surveiller et Punir), au profit de la responsabilisation et de la régulation. Ce qui constitue pour le coup, une révolution des approches et des pratiques, fait souffler un vent d’espoir chez les personnes en souffrance psychique, au regard de l’histoire de la psychiatrie, de la dimension carcérale au XIXe siècle, à une forme de normalisation sociale, qui rejaillit sur l’ensemble des personnes handicapées.

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